Les consommations de carburant très basses annoncées par les constructeurs ne se retrouvent jamais dans la vraie vie. Pourtant, depuis un an, le mode de calcul a évolué vers plus de réalisme. Mais les écarts subsistent.
Les consommations affichées par les constructeurs s’annoncent mirifiques : 4 litres, 4,5l, 5l aux 100 km. Mais, dans la vraie vie, les chiffres ne sont pas aussi avantageux. Cela se vérifiait surtout avec l’ancienne norme utilisée pour mesurer la consommation, la norme NEDC, jetée aux oubliettes en septembre 2018.
Elle reposait sur un test particulièrement peu contraignant, reproduisant des vitesses très basses et des accélérations incroyablement lentes : personne ne conduit réellement ainsi. D’où des écarts parfois faramineux que vous constatez avec votre propre consommation.
Selon les relevés du magazine Auto Plus, la consommation réelle des voitures s’établissaient entre + 20 et +95% par rapport aux chiffres officiels !
Ecart record, la Fiat 500 0.9Twin Air : 4l revendiqués par le constructeur, 7,8l relevés en conditions réelles. Exit donc cette norme illusoire, qui perdurait depuis …1973 !
LA NORME BIEN PLUS REALISTE
L’an dernier, la nouvelle norme, baptisée WLTP a débarqué. S’il s’agit toujours d’un test en laboratoire, elle repose sur un cycle enfin plus sévère : 30 minutes au lieu de 20, un kilométrage équivalant à 23 km au lieu de 11km avec, surtout des accélérations plus marquées, une vitesse moyenne accrue de 40% (46,5km/h) et des pointes à 131 km/h. enfin un schéma plus réaliste !
Tellement plus réaliste que d’un coup, les consommations mesurées ont fait des bonds de 20 à plus de 50%. Les constructeurs s’étouffent. L’augmentation est tellement forte que les autorités décident de reporter l’application de la nouvelle norme. Avec, dans un premier temps, une période transitoire où les consommations affichées reposent sur une norme intermédiaire, dite « NEDC corrélé ». Il s’agit des mesures de l’ancienne norme (NLDC) majorées d’un pourcentage : entre +6% et 12%.
Avec le NEDC corrélé, les déconvenues persistent. La Renault Talisman modèle essence en 1,3TCe est annoncée à 5,6l en NEDC corrélé alors qu’elle consomme en réalité 6,5l selon l’Auto Journal. De quoi décevoir ceux qui, incités par les discours des politiques, auraient opté pour la version essence après avoir conduit la Renault Talisman diesel qui se contentait de 4l de gazole dans sa très sobre version 1.5 dCi 110.
Si, succombant à la mode, ils optent pour un SUV, autrement dit un modèle familial de type 4x4, le passage à l’essence se révélera particulièrement douloureux ; un Ford Kuga ou un Volkswagen Tiguan essence annoncent respectivement 6,9 et 6,3l en NEDC corrélé alors qu’ils frisent les 9l, selon les mesures de la presse automobile.
41% D’AUGMENTATION POUR LA TOYOTA PRIUS
Si un nouveau report n’est pas entre temps décidé, la norme WLTP sera en vigueur l’an prochain. Elle réserve des surprises car les consommations officielles ne vont pas augmenter de la même manière. Loin s’en faut ! Les hybrides font parties des plus pénalisées. Ainsi, la Toyota Prius+ passe d’une consommation officielle de 4,1l à … 5,8l. Soit 41% d’augmentation ! Et ses 96 grammes affichées de CO2, au km se transforment en 131g – un niveau qui entraîne l’application d’un malus !
Pénalisées également, les voitures dotées des fameux petits moteurs à essence « down sizés » (réduits). Les constructeurs ont conçu ces mécaniques pour profiter des lacunes de l’ancienne norme. Il s’agit des moteurs à essence de petites cylindrées, avec la greffe d’un turbo pour compenser : 1,2 PureTech chez Peugeot-Citroën, 1,0 EcoBoost chez Ford, 1.0 Ecoflex chez Opel…Avec le cycle NEDC, ces moteurs peu sollicités ressortaient avec des chiffres extraordinairement bas. Mais leurs besoins réels en carburant se situaient couramment 30 à 35% au-dessus.
C’est particulièrement le cas pour des modèles assez lourds. Exemple : un Peugeot 5008 d’entrée de gamme avec un petit 3 cylindre, 1,2 litre bondit de 5,1l en NEDC corrélé à 6,7l avec la norme WLTP. Soit 30% de plus. Ses rejets annoncés de CO2 passent de 117 à 153 grammes !
LES CATALOGUES VONT ÊTRE CHAMBOULÉS
Ainsi, des versions auparavant vantées comme très sobres commencent à disparaître des catalogues. Ford a arrêté sa grande berline familiale Mondeo dotée de petit moteur 1.0 litre. Dans les mois qui viennent, les gammes des constructeurs vont connaître des chamboulements d’envergure. Beaucoup de versions, parfois même très vendues, seront supprimées. Avec la fin des normes laxistes, elles révèlent leur vrai visage : trop consommatrices, trop génératrices de CO2, elles imposent un malus dissuasif. Et, pour les constructeurs, il devient nuisible de les conserver dans leur offre : elles pèseront lourd dans les pénalités qu’ils devront verser à partir de 2021, si la valeur moyenne des voitures qu’ils vendent dépasse 95 grammes du CO2 au km.
Enfin plus réaliste, le nouveau cycle d’homologation vise une plus grande transparence et une plus grande justesse : les consommations dans les documents et les publicités des constructeurs seront enfin proches de la réalité.
Au passage, les consommateurs vont découvrir l’impact des équipements (niveau de finition et options telles qu’un toit ouvrant, attelage…). Précédemment, les consommations annoncées variaient en fonction du moteur, de la boite de vitesses et de la taille des roues. La norme WLTP a imposé la prise en compte de la dotation réelle de la voiture. Selon ses équipements, une berline VW Passat 2.0 TDI 150, par exemple, sera annoncée avec une consommation de 5,1 à 5,6l.
LES DIESELS TOUJOURS FAVORISÉS !
Tout n’est pas encore parfait : les tests restent faits en laboratoire, dans les conditions qui, certes, recréent celle de la circulation réelle, mais imparfaitement. Alors que les relevés effectués sur circuit, voiture roulante, demeurent la meilleure solution. Depuis 2001, l’Automobile Magazine propose des consommations ainsi mesurées, qui bénéficient de la très sérieuse certification iso 9001. « 60 » fournit aussi les consommations réelles pour les essais de voitures hybrides que nous publions depuis 2017 (voir par exemple, notre test de SUV hybrides, n°546, mars 2019).
Il y a un autre point qui fâche : la France conserve le même système aberrant de bonus / malus écologique. Aberrant, parce qu’il n’est basé que sur les rejets de gaz carbonique, dépendant uniquement de la quantité de carburant absorbée. A ce petit jeu, les voitures diesels continuent d’être avantagées, puisqu’elles consomment 20 à 25% de moins de carburant. Une Renault Espace impose un malus de 353€ en diesel, 4 460 en essence. Pas vraiment une incitation à abandonner le gazole !
JEAN REMY MACCHIA
COMMENT MOINS CONSOMMER
1 – mettez la (bonne) pression
Gonflez bien vos pneus : un manque de pression de 0.5 bar, c’est 2.5% de consommation en plus, et une tenue de route altérée. Le gaspillage de carburant dû au sous-gonflage est estimé à 4 milliards de litres par an en Europe.
2 – adaptez vos pneus
Aujourd’hui, les fabricants proposent des pneus « basse résistance au roulement ». Ils diminuent leur frottement au sol. Les meilleurs permettent jusqu’à 4% d’économie de carburant. Toutes les grandes marques en proposent : Michelin Energy Saver, Goodyear Efficient Grip… Prix quasi identique aux pneus traditionnels.
3 – entretenez la mécanique
Un filtre à air encrassé peut majorer votre consommation jusqu’à 15%. Si vous roulez beaucoup en ville, ou que ce filtre n’a pas été changé depuis plus de 30 000km, faite le remplacer. Sur un moteur à essence, des bougies encrassées augmentent les besoins en carburant jusqu’à 15%
4 – contrôlez vos accélérations
Ecrasez l’accélération coûte cher en carburant. Conduisez en souplesse. Passez le plus vite possible les rapports supérieurs de la boite de vitesses, sans conserver trop longtemps les intermédiaires.
5- anticiper les freinages
C’est en freinant que vous gaspillez du carburant : vous dissipez en pure perte l’énergie que votre voiture a utilisée pour atteindre votre vitesse. Bien avant un virage ou un carrefour, cessez d’accélérer et ralentissez en douceur.
6 – évitez le point mort
Lorsque vous ralentissez, pas besoin de rester débrayé ni de passer au point mort : au ralenti, votre moteur consomme encore un peu de carburant. Alors que si vous décèlerez en rétrogradant, l’alimentation en carburant est coupée : zéro conso.
7 – réservez vos barres de toit au jour « J »
Vous n’avez pas besoin de vos barres de toit ? Enlevez-le ! Sur autoroute, c’est 6 % de consommation en plus. Et 10 à 12% avec un coffre de toit.
8 – mollo sur la clim
La climatisation majore votre consommation de 3 à 8%. L’été, une fois la bonne température atteinte dans l’habitacle, vous pouvez couper de temps en temps, à moins que sévisse une canicule. Lorsque vous entrez dans une auto surchauffée, stationnée en plein soleil, mettez d’abord la ventilation à fond ou ouvrant toutes les portières, avant de lancer la clim. L’hiver, utilisez-la seulement trois minutes pour chasser la buée.
9 – vitre ouvertes : ça dépend
Roulez sur autoroute avec les quatre vitres ouvertes provoque des remous d’air et augmente la consommation jusqu’à 5%. Au-delà de 110km/h, mieux vaut utiliser la clim.